Scapa-Flow

 

Aux petites heures du 14 octobre 1939, le U 47 s'introduit à l'intérieur du mouillage de Scapa Flow dans les Orcades et coula un cuirassé de la Home Fleet, le Royal Oak.

Cette attaque, " la plus hardie de toutes les entreprises hardies ", avait été méticuleusement préparée par Dönitz après étude des photographies des défenses rassemblées par les services de renseignement : innombrables filets sous-marins, barrages et champs de mines qui, tout de même, révélaient ce qui apparaissait comme un chenal non protégé de cinquante pieds entre les trois blockships de Holm Sound, juste de quoi laisser à un U-Boot la possibilité de glisser en surface au moment de l'étale.

Dönitz convoqua pour un entretien un lieutenant de vaisseau de trente et un ans, Günther Prien, solide officier de la deutscher Lloyd passé dans la Kriegsmarine. Il s'était révélé l'un des plus déterminés parmi les nouveaux commandants de sous marins, et avait la réputation d'être très strict sur le chapitre de la discipline, a tel point qu'il n'était pas exceptionnel pour lui de rentrer de patrouille avec un tiers de ses hommes sur le cahier de punitions. Pourtant Dönitz considérait l'opération comme si dangereuse qu'il laissa quarante-huit heures à Prien pour refléchir avant d'accepter la mission. Le jeune commandant accepta sans hésitation.

Appareillage de l'U47 pour Scapa-Flow

On avait gardé un secret absolu sur l'appareillage de l'U-47 et, le 12 octobre, Prien approchait de la base si bien gardée des Orcades. Après un journée d'émotion passée sur le fond tandis que les mécaniciens s'affairaient à reparer quelques défaillances techniques, Prien fit surface tard dans la soirée du 13 octobre. Il fit sa difficile approche dans les eaux plus calmes qui suivent l'étale de haute mer, au moment où il aurait ses meilleures chances de pouvoir franchir l'étroit chenal. S'il était arrivé vingt-quatre heures plus tard, il aurait trouvé la passe obstruée par un nouveau blockship attendu pour le lendemain matin, mais là, peu après minuit, il avait toute sa chance, comme on peut le lire dans son journal de navigation:

C'est dégoûtant ce qu'il fait jour. Toute la rade scintille... Au sud de Cava, il n'y a pas de mouvements, c'est pourquoi, jouant tout sur le succès, il nous faut prendre le maximum de précautions. Nous venons donc sur bâbord et mettons le cap au nord vers la côte. Deux cuirassés à l'ancre et, plus à terre, des destroyers. Pas de croiseurs en vue, par conséquent nous allons attaquer les gros. Distance, 3 000 mètres. Torpilles réglées à 7,5 m. Mise à feu contact. 01 h 16 : torpille lancée sur le bateau le plus au nord, deux sur celui du sud. Après trois bonnes minutes et demie, une torpille explose sur le bateau au nord. On ne voit rien des deux autres torpilles. 01 h 21: torpille lancée de l'arrière; à l'avant les deux tubes sont chargés; lancé trois torpilles de l'avant. Après trois minutes tendues, on entend une détonation sur le bâtiment le plus proche. Violente explosion, ronflement et grondement, puis des colonnes de feu et des éclats volent dans l'air. La rade s'éveille en sursaut. Les destroyers allument leurs feux, des signaux partent de tous côtés et sur terre, à 200 mètres de moi, des moteurs d'autos ronflent le long des routes. Un cuirassé a été coulé, un second endommagé et les trois autres torpilles ont brûlé. Tous les tubes sont vides.

Ce que Prien avait pris pour un second navire de combat était un transport d'hydravions, mais il avait coulé le cuirassé Royal Oak dont 786 officiers et marins avaient péri.

Le cuirassé Royal Oak

Le reste de la Home Fleet s'était dispersé après avoir donné la chasse au Gneisenau à travers la mer du Nord. La destruction de ce cuirassé ancien était un désastre moindre que ce n'eût pu l'être, mais néanmoins, pour la Royal Navy, c'était une révélation humiliante de la vulnérabilité de sa base principale. Pour l'opinion publique britannique, un bâtiment de ligne était toujours un bâtiment de ligne - quel que fût son âge - et la perte du Royal Oak fut ressentie comme un désastre douloureux. Il y eut des réactions de colère de la presse à l'en-droit de la propagande triomphante de l'Allemagne se vantant que la Grande-Bretagne avait été "expulsée de la mer du Nord ".

Vue d'artiste - U-47 quittant Scapa-Flow après le torpillage du Royal Oak

" Un magnifique fait d'armes. " Ce fut le commentaire de Churchill à-propos de la destruction du cuirassé Royal Oak. Il valut au Kapitänleutnant Gunther Prien d'être accueilli en héros à Berlin. Karl Dönitz fut promu pour avoir conçu la plus hardie des entreprises.

L'U-47 a atteint Wilhelmshaven le 17 octobre 1939 à 11h44, où l'équipage a été accueilli en héros, puis conduit à Berlin pour y être félicité, et déjeuner avec Hitler. Günther Prien y recevra la croix de fer de chevalier.

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Vidéo du retour de l'U-47. Document exceptionnel et rare!

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